Les dernières semaines (mois) n’ont pas été faciles. Je suis (j'étais ?) comme une éponge qui absorbe les émotions des autres et tente d’anesthésier les siennes dans la « bouffe ». Je me gave comme une oie. Je bouffe pour oublier, pour m’oublier. J’ai peur de mes émotions. Peur d’être triste. Peur d’être malheureuse. Peur de mes larmes. Peur de ne pas surmonter. La seule chose qui me console (davantage qu’un câlin) c’est la bouffe. Du sucré, du salé. Étrangement, même si j’ai très peur d’être malheureuse et que je bouffe pour ne pas l’être, une fois que j’ai bouffé je suis malheureuse quand même. Et en sus, je culpabilise d’être si nulle. Sauf que j’ai une incroyable propension à oublier que bouffer ne m’a jamais rendu heureuse. Cet été, au plus fort de mes crises de boulimie, j'ai cessé de me peser. Je ne pouvais plus affronter la réalité. Le choc aurait pu être plus brutal quand je me suis enfin pesée le 26 août. Je n'ai pas aimé le chiffre que j'ai vu mais je savais qu'il en serait proche, qu'il ne pouvait en être autrement (une oie ne se gave pas impunément, plaît-il....). J'ai décidé de me lancer dans un énième régime protéiné que j'ai (vite, très vite) abandonné au bout de quelques jours. Épuisée. Je n'ai plus la force. Je n'ai plus l'envie, aussi, même si j'ai toujours envie de retrouver un corps avec lequel je puisse enfin faire la paix (à bientôt 38 ans, il serait temps !). J'ai aussi décidé de ne plus me peser et là par contre, je n'ai rien renié. Moi l'obsédé compulsive de la balance, j'ai même trouvé cela facile. Je me suis (re)pesée pour la première fois samedi dernier et depuis je ne suis pas remontée sur la balance. Je ne pense pas me peser samedi, je découvre la vie en dehors du conditionnement de mes états d'âme à un chiffre. C'est étrange, mais j'aime cette sensation. Je me répète comme une évidence que me peser tous les jours (ou toutes les semaines) ne me fera pas maigrir plus vite. J'avais téléchargé une appli pour l'Itruc où je note mon poids (et où je vois ensuite mon IMC, waaaaahhhhhh) en juin ou juillet, je ne me rappelle plus. Je ne l'ai utilisé que quelques fois depuis. J'apprécie de voir la courbe à la baisse mais ce n'est plus une addiction. Je pense fréquemment "Zermati" depuis quelques temps, sans pour autant me dire que je zermate. Je prends conscience de ma faim, sans avoir peur, même si souvent encore je mange sans faim, juste parce que c'est l'heure. Mais je ne me condamne plus, j'ai le droit de ne pas tout réussir du premier coup. J'ai aussi le droit (et le devoir) de me pardonner ces imperfections qui font de moi celle que je suis.
J'ai retrouvé (même si ce n'était pas réellement perdu) ces quelques mots griffonnés dans un petit carnet, en juin, alors que je m'interrogeais sur une énième reprise de poids et sur ce rapport compliqué à mon poids et SURTOUT, aux régimes.
"Je suis une obsédée compulsive de la BOUFFE. Parfois, je me demande si inconsciemment, je ne suis pas une grosse refoulée. Une grosse qui aime être grosse mais qui ne l’assume pas. A chaque fois que je régime (et par conséquent que je perds du poids) j’oublie TOUJOURS le même détail : il faut te STABILISER, ma grosse. Peut-être que l’idée de maigrir « par pallier » n’est pas si bête que ça (cette idée n’est pas de moi). Genre perdre 5 kilos, STABILISER quelques temps, puis recommencer à régimer. Avant de STABILISER à nouveau. Etc…".
Depuis, je ne réalise pas vraiment quelle est ma manière de pensée. Je crois que le point majeur qui a changé bien des choses dans mon relationnel à la nourriture, c'est de décider de m'apaiser ET de ne plus me peser. De vivre en m'acceptant. Et ce n'est pas facile que de s'accepter, quand le regard des autres est une souffrance, peut-être même davantage que le sien. Mais je cultive mon zen intérieur, comme un jardin privé et secret. Je ne laisse aucun autre le pénétrer, pour ne pas en troubler sa fragile sérénité.